Débat
proposé par le journal La Croix le 20 Octobre 2012
Emmanuel
Laurentin: Animateur de la Fabrique de l’Histoire, sur France
Culture
Etienne
Gangneron: Président de la commission agriculture biologique de la
FNSEA
Bertrand
Hervieu: Agronome français
Severin
Husson: Journaliste du journal La Croix
Emmanuel
Laurentin:
Grande
différence entre l’image des paysans et la réalité.
Evolutions
technologiques créent un fossé entre les petits et les grands.
Qui
fabrique cette image ?
Les
institutions, les groupes sociaux, les chercheurs...
Les
médias du monde rural, l’action catholique, le parti communiste,
ministère de l’agriculture, les agriculteurs eux-mêmes (R.
Lacomte, J. Bové...)
Par
exemple l’image produite par le gouvernement Vichy autour de la
terre.
Il
faut réfléchir à ces images.
Etienne
Gangneron:
A
partir de cette complexité d’images, les agriculteurs se
retrouvent mal dans l’image des médias. Pourtant l’histoire est
riche de l’agriculture française. Les médias n’ont pas la
capacité de rentrer dans la diversité des exploitations, car il n’y
en a pas une qui fonctionne de la même manière. La vache folle en
1996 a été un coup dur pour les agriculteurs.
L’image
des agriculteurs en France est bonne, mais qu’en pensent-ils ?
L’ensemble du retour média n’est pas le même, il porte un
regard plus cruel pour permettre la vente des journaux.
Il
y a une disparition progressive de l’élevage en France car il y a
plus de contraintes que pour la culture, ce qui est terrible pour la
biodiversité et les médias participent à dégouter les éleveurs
de leur métier.
Bertrand
Hervieu:
Le
poids du passé est lourd, l’image renvoie à la modernisation, une
image de l’agriculteur moderne qui s’est figée, c’est le
projet politique de la Vème république.
Le
XXIème est une réalité paradoxale, les paysans sont une minorité
(2% de la population), c’est un groupe éclaté. Les exploitations
familiales s'effondrent, donc les grands groupes rachètent.
Face
à cette situation, les organisations professionnelles ont du mal à
rendre compte de l’image, il est difficile de construire une image.
Etienne
Gangneron:
Il
faut trouver un deal, ils faut que les propriétaires fonciers louent
aux agriculteurs. Il y a une disparition de la main d’oeuvre
familiale, hors on a besoin de main d’oeuvre salariée, qui dit
salarié dit code du travail, ce qui nous rapproche de la notion
d’entreprise.
Severin
Husson:
Les
agriculteurs ont une bonne image, selon le dernier sondage montre que
74% des Français leur font confiance, mais les agriculteurs ont
toujours le sentiment d’être mal aimés et incompris par le monde
urbain. Ils trouvent que les médias sont cruels.Le décalage entre
papier et réalité s’explique par:
-Hétérogénéité
du monde agricole, avec des méthodes de travail différents, donc il
n’y a pas de profil type.
-Il
y a beaucoup d’informations d’ordre économique et peu d’éléments
sur le mode de vie, donc c’est difficile à comprendre.
-C’est
un sujet dur à aborder, car c’est très technique et éloigné des
urbains. De plus il y a des sujets de polémiques (OGM,
l’environnement...), donc les agriculteurs ne se retrouvent pas
dans les articles.
-Les
organisations syndicales sont bien organisées, donc le message porté
ne montre pas la diversité chez les exploitants agricoles.
Emmanuel
Laurentin:
Il
y a une projection catastrophique à la télé, avec par exemple
«L’amour est dans le pré», il y a une complexité à montrer le
monde agricole, le nombre de suicidés reste encore un sujet tabou,
on parle de France Telecom, mais pas des agriculteurs. C’est une
crise muette, qui devrait être dite.
Bertrand
Hervieu:
Il
y a beaucoup de professions étiquetées qui passent à la télé et
le monde agricole n’y échappe pas. Il n’y a pas beaucoup de
professions qui aiment la façon dont elles sont représentées,
comme les enseignants ou les prêtres, etc... Tout est partiellement
typé et caricaturé. En France, il y a le plus fort taux de
pessimisme en Europe,du à la peur que les enfants n’atteignent pas
le même statut que les parents ont. On dénombrerait entre 350 et
400 suicides par an chez les paysans.
Anis Marine, Borbeau Cyril
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